Selon les régions et les traditions, les petites canines supérieures des grands cervidés sont appelées « crochets », « coins » ou plus poétiquement « fleurs de lys ». Bien qu’il ne s’agisse que de deux dents modestes, elles suscitent depuis longtemps fascination et convoitise. Elles sont considérées comme un vestige de l’évolution de l’espèce, et constituent un précieux souvenir pour les chasseurs, qui aiment les transformer en bijoux ou en ornements. Les fleurs de lys sont en réalité les deux seules canines supérieures qui subsistent encore, et témoignent d’un passé lointain où les ancêtres du cerf portaient des canines beaucoup plus développées. Aujourd’hui, ces dents ont perdu toute fonction alimentaire : elles ne participent pas à la mastication et ne sont pas opposées à d’autres dents.
C’est pourquoi elles restent pratiquement intactes au cours de la vie de l’animal. On les retrouve implantées sur le segment de la mâchoire supérieure qui, à l’ordinaire, est dépourvu de dents. Leurs racines sont courtes, preuve de leur rôle devenu accessoire. Cette implantation superficielle explique qu’elles puissent être retirées relativement facilement, parfois simplement avec la pointe d’un couteau. La modestie actuelle de ces dents contraste avec leur importance dans le passé. Les représentations anciennes en témoignent. Dans « Le Livre de la Chasse » de Gaston Phébus (1389), une miniature intitulée « Le Brame » montre clairement des cerfs dont les canines dépassent de plusieurs centimètres en dehors de la bouche. Si l’artiste a respecté les proportions, ces crochets pouvaient mesurer cinq centimètres ou davantage, soit 3 à 4 fois plus des tailles actuelles (généralement entre 1 et 2 cm). Cette régression au fil du temps illustre bien la transformation morphologique des cervidés...
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