Le petit journal de deux indissociables : la chasse et l'environnement

Dégâts de gibier : les agriculteurs sont-ils victimes ou complices ?

La polémique enfle entre chasseurs et agriculteurs autour d’un sujet aussi sensible qu’ancien : les dégâts causés par les sangliers. Les surfaces agricoles, notamment les pois, les céréales en lait, les maïs et les prairies, subissent chaque année des dommages considérables, évalués à plusieurs dizaines de millions d’euros à l’échelle nationale. Ce sont les fédérations départementales de chasseurs (FDC) qui indemnisent les exploitants, financées par les cotisations des chasseurs et, parfois, de subventions publiques. Mais face à la persistance du problème et au coût croissant des indemnisations, la FNC a récemment proposé une piste explosive : demander une participation financière directe aux agriculteurs. Cette idée, portée par Willy Schraen, président de la FNC, a immédiatement suscité un tollé au sein du monde agricole. Pour Grégory Nivelle, président de la Commission « Faune sauvage » de la FNSEA, le raisonnement est inacceptable. « Il ne faut pas inverser le problème », prévient-il. À ses yeux, faire contribuer les agriculteurs reviendrait à considérer qu’ils sont, d’une certaine manière, responsables des dégâts. Or, selon lui, ils en sont avant tout les victimes. Cependant, les chasseurs avancent un argument récurrent : en cultivant massivement du maïs, culture particulièrement appréciée des sangliers, les agriculteurs favoriseraient indirectement leur concentration et leur prolifération. La présence de « cultures appétentes » constituerait donc une forme de complicité involontaire...

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L’enseignement agricole part dans l’espace...

Aux côtés du Centre national d’études spatiales (CNES), l’enseignement agricole s’engage dans une initiative pédagogique ambitieuse et novatrice. Cette action s’inscrit dans la mission « εpsilon », menée par le CNES en partenariat avec Sorbonne Université, le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (MENESR) ainsi que le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire (MASA). Elle accompagne la préparation de la mission de l’astronaute française Sophie Adenot, membre de l’Agence spatiale européenne (ESA), qui rejoindra en 2026 la Station spatiale internationale (ISS). Ce projet éducatif, baptisé « ChlorISS », reprend l’esprit des expériences déjà réalisées lors des missions de Thomas Pesquet, notamment « Exo-ISS » et « Élève ton blob », qui avaient mobilisé un très large public scolaire. L’objectif est de permettre à des milliers d’élèves de reproduire en classe une expérience conduite en micropesanteur dans l’ISS. Concrètement, il s’agira d’observer la germination et le développement de deux plantes de la famille des brassicacées : l’arabette des dames (Arabidopsis thaliana), très utilisée en recherche fondamentale, et le mizuna (Brassica rapa japonica), une salade consommée aussi bien sur Terre que dans les programmes alimentaires spatiaux. Les élèves compareront leurs résultats avec ceux obtenus en orbite, afin de comprendre les effets conjugués de la gravité et de la lumière sur la croissance végétale. L’enseignement agricole joue un rôle déterminant dans la réussite de ce programme. Quatre établissements pilotes ont été retenus pour la phase préparatoire : les lycées agricoles de Carcassonne (Aude) et de Wintzenheim (Haut-Rhin), ainsi que le lycée professionnel horticole Le Petit Chadignac (Charente-Maritime) et le lycée professionnel agricole de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales)...

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Un nouveau directeur à la tête du Conseil international de la chasse

Le Conseil international de la chasse et de la conservation du gibier et de la faune sauvage (CIC) traverse une étape importante de son histoire institutionnelle avec un changement de direction au sommet. Après cinq années de service marqué par un profond engagement, M. Sebastian Winkler a quitté son poste de Directeur général du CIC le 5 septembre 2025. Jusqu’en décembre, il continuera à épauler l’organisation en tant que conseiller pour les affaires de politique internationale, avant de s’orienter vers de nouveaux défis professionnels à Genève. Durant son mandat, M. Winkler s’est illustré par une vision stratégique et une grande capacité de mobilisation. Il a notamment piloté l’élaboration de la stratégie CIC 2030, qui trace une feuille de route ambitieuse pour l’organisation dans un contexte mondial en pleine évolution. Depuis le 8 septembre 2025, la direction générale est confiée à M. Arno Wimpffen. Figure familière du CIC et membre de son équipe depuis de nombreuses années, il possède une solide expérience acquise au cœur des institutions européennes à Bruxelles. Ses compétences s’étendent de la gestion de partenariats internationaux à la représentation du CIC dans différents forums politiques et techniques. Au-delà de son expertise professionnelle, M. Wimpffen apporte également une perspective personnelle unique. Fort de plus de quarante ans d’expérience comme chasseur passionné et propriétaire foncier engagé, il incarne le lien entre la pratique cynégétique, la gestion durable des territoires et la défense de la biodiversité. Son profil illustre parfaitement l’esprit du CIC : concilier traditions, science et responsabilité environnementale.


Laurence Parisot prend la tête de la Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences

La Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA) vient d’annoncer la nomination de Laurence Parisot à sa présidence, en succession de Louis Schweitzer. Une étape importante pour cette institution qui milite depuis plus de 40 ans en faveur de la reconnaissance des droits des animaux et d’une meilleure prise en compte de leur condition dans la société. Laurence Parisot est loin d’être une inconnue. Femme de pouvoir et de réseaux, elle s’est imposée dans le paysage économique français en dirigeant l’Ifop pendant plus de vingt-cinq ans (1990-2016), puis en devenant la première femme à la tête du Medef, de 2005 à 2013. Aujourd’hui présidente de Citi pour la France, elle continue de jouer un rôle majeur dans les cercles de décision. Mais au-delà de son profil d’économiste et de dirigeante d’entreprise, elle s’est toujours affirmée comme une femme de convictions. Son engagement en faveur des animaux n’est pas récent : vice-présidente de la Fondation Brigitte Bardot jusqu’en 2019, elle a ensuite rejoint la LFDA dont elle est devenue vice-présidente en 2020. Son parcours illustre la constance d’un engagement qu’elle souhaite désormais porter à une autre échelle, en associant son influence et son expérience au service d’une cause qui, selon elle, « n’est plus périphérique mais centrale dans nos sociétés modernes ». En prenant la présidence de la LFDA, Laurence Parisot entend donner une nouvelle impulsion. « La cause animale n’est pas un sujet secondaire. L’opinion publique l’a compris, seuls les responsables politiques la négligent. Nous ne pouvons prétendre défendre justice et bienveillance tout en refusant aux animaux le droit de vivre et de ne pas souffrir », affirme-t-elle. Et de lancer un appel direct au Premier ministre Sébastien Lecornu : « Au nom de la LFDA, je demande la nomination d’un(e) ministre en charge de la Condition animale...».


Hommage à l’abbé Nicolas Genost de Laforest (le curé de Chapaize) au château de Lugny (71)

Le samedi 4 octobre 2025 à 16 heures, une cérémonie se tiendra au château de Lugny (71) pour dévoiler une plaque commémorative en hommage à l’abbé Nicolas Genost de Laforest, curé de Chapaize au 18e siècle. Mort au château le 6 octobre 1783, à la suite d’une blessure reçue lors d’une chasse organisée par le comte de Montrevel, baron de Lugny, l’abbé fut inhumé le lendemain à Lugny. Reconnu pour son talent de chasseur autant que pour son engagement religieux, l’abbé Genost de Laforest inspira plusieurs générations, notamment le marquis de Foudras, châtelain de Demigny. Dans son ouvrage « Les Gentilshommes chasseurs », publié au 19e siècle, le marquis consacre plusieurs passages à l’abbé, sous les traits du personnage de l’abbé Duverger. Il évoque notamment son habileté à la chasse et son tempérament estimé par ses pairs, qualifiant affectueusement le personnage de « pauvre défunt, Monsieur le Curé de Chapaize » (Foudras, XIX siècle, Les Gentilshommes chasseurs, chap. IV et V). Ces récits constituent aujourd’hui une source précieuse pour retracer l’histoire locale et la vie de l’abbé. L’événement organisé par Marie-Chantal Laurens, présidente des Foyers communautaires, et les adhérents de l’association, propriétaire du château de Lugny, sous l’impulsion de Frédéric Lafarge, historien de la commune, se déroulera au pied des tours d’entrée de l’ancienne maison forte. Frédéric Brochot, biographe de l’abbé, participera également à la cérémonie, tandis que les trompes de chasse accompagneront l’hommage, rappelant le rôle central de la chasse dans la vie et l’histoire de l’abbé Genost de Laforest. Cette commémoration vise à mettre en lumière une figure locale majeure, dont la mémoire a traversé les siècles grâce aux archives et aux récits littéraires du marquis de Foudras. Elle illustre également l’importance de la collaboration entre historiens, associations patrimoniales et communautés locales pour la préservation du patrimoine et la transmission de la mémoire collective.


Des tonnes de pesticides détectées dans les nuages au-dessus de l’Europe

Une étude scientifique menée par le laboratoire de météorologie physique de l’université de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) met en lumière une pollution atmosphérique jusqu’ici largement sous-estimée. En analysant six échantillons de nuages prélevés à 1 500 mètres d’altitude, au sommet du Puy de Dôme, les chercheurs ont identifié 32 substances chimiques différentes : herbicides, fongicides, insecticides, mais aussi des molécules interdites depuis plusieurs années, comme l’atrazine. Les concentrations relevées surprennent par leur intensité : dans la moitié des cas, elles dépassent les seuils maximums fixés par l’Union européenne pour l’eau potable (0,1 µg/L par substance et 0,5 µg/L au total). En extrapolant ces mesures, l’équipe a estimé que les nuages transporteraient chaque année jusqu’à 140 tonnes de pesticides au-dessus de notre continent. Les chercheurs rappellent que les pesticides sont des molécules hautement volatiles. Une fois épandus sur les champs, ils s’évaporent, se lient aux particules atmosphériques et peuvent voyager sur plusieurs milliers de kilomètres avant de retomber avec la pluie. Ce « saut de sauterelle » explique la présence de produits interdits en Europe : ils proviennent vraisemblablement de régions où leur usage reste autorisé. Des études antérieures avaient déjà mis en évidence la contamination de zones reculées. Ainsi, en 2021, des résidus de pesticides avaient été mesurés dans les glaces de l’Arctique, tandis qu’en 2019, des traces de glyphosate avaient été retrouvées dans les pluies du Massif Central. L’étude publiée dans Environmental Science & Technology confirme que même les environnements naturels considérés comme « préservés » (montagnes, forêts ou pôles) ne sont pas épargnés.


Plan d’accompagnement financier « dégâts de gibier » pour 2025

La FNC vient de transmettre aux fédérations départementales la circulaire relative au troisième et dernier volet du plan d’accompagnement financier signé en 2023 pour une durée de trois ans. Ce dispositif prévoyait des versements de 25 M€ en 2023, 20 M€ en 2024 et 15 M€ en 2025, en contrepartie d’une réduction de 20 à 30 % des surfaces détruites par le grand gibier, par rapport à 2019, dans un délai de trois ans. Les deux premières tranches ont bien été honorées, mais celle de 2025 a été réduite : de 15 M€, elle est passée à 10 M€. Cette décision avait été annoncée dès 2024, à la suite d’un courrier du ministère. Le contexte budgétaire et politique faisait même craindre la suppression totale de l’enveloppe. Grâce aux démarches engagées par la FNC — prises de parole publiques, sensibilisation des parlementaires et des acteurs agricoles, diffusion d’un dossier de presse —, une partie des crédits a pu être sauvegardée. Pour défendre l’accès aux financements, la FNC a présenté les résultats obtenus en matière de réduction des surfaces détruites. À ce stade, seules les données de la récolte 2024 sont disponibles, celle de 2025 étant encore en cours. À l’échelle nationale, le taux de réduction atteint 18,4 %, dépassant le jalon fixé à 15 %. Cette progression reste toutefois contrastée selon les départements, certains affichant de nets progrès, d’autres accusant encore des difficultés. Durant l’été, les services de la FNC et du ministère ont travaillé à l’élaboration d’un nouvel avenant à l’instruction de 2023. Celui-ci précise les modalités de répartition de l’enveloppe de 10 M€, selon les règles actées lors du Tour de France 2023 de la FNC. Deux principes ont guidé ce travail :

- l’actualisation des références de répartition sur la base de la moyenne des trois dernières années de charges de dégâts connus (hors plan de résilience) ;

- l’application de réductions en cas de non-atteinte des objectifs progressifs fixés entre 2019 et 2024, les résultats de 2025 n’étant pas encore disponibles.

Cet avenant officialise le lancement du versement de l’enveloppe attendue. Parallèlement, la FNC poursuit ses échanges avec l’État, les parlementaires et le monde agricole pour faire avancer le chantier prioritaire d’une refonte globale du régime d’indemnisation des dégâts de grand gibier, dont les limites apparaissent de plus en plus clairement. En définitive, par rapport à l’accord conclu au Salon de l’Agriculture en 2023, ce sont bien 5 millions d’euros qui n’entreront pas dans les caisses des FDC. La mise en place d’une répartition « aux résultats » atténuera sans doute partiellement cette baisse, mais les fédérations devront malgré tout s’adapter et parvenir à équilibrer leurs comptes dans un contexte déjà très tendu.


L’assèchement estival des petits cours d’eau en France (2012-2024)

Chaque été, de nombreux petits cours d’eau métropolitains connaissent une baisse de débit pouvant aller jusqu’à l’assèchement complet de leur lit. Ce phénomène naturel, appelé étiage, est accentué par les usages humains (irrigation, alimentation en eau potable) et représente un enjeu majeur pour la société comme pour la biodiversité. Afin de le suivre, l’OFB a créé en 2012 l’Observatoire national des étiages (Onde), dont la dataviz publiée en 2025 synthétise treize années d’observations. Un étiage prolongé fragilise les fonctions écologiques des rivières : épuration naturelle, recharge des nappes phréatiques, approvisionnement en eau douce pour l’agriculture, l’industrie ou les usages domestiques. L’assèchement des cours d’eau entraîne aussi une dégradation de la qualité de l’eau et une hausse de sa température, modifiant les habitats aquatiques. Les impacts sont multiples : destruction de zones de frai, mortalité des espèces peu mobiles (alevins, amphibiens), recul des espèces autochtones au profit d’espèces invasives plus résistantes. Le réseau Onde s’appuie sur des relevés visuels réalisés dans tous les départements, principalement de mai à septembre. Trois états sont distingués :

- écoulement visible (eau circulant en continu),

- écoulement non visible (présence d’eau stagnante sans courant),

- assec (absence d’eau)...

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Le traité sur la haute mer entrera en vigueur le 17 janvier 2026

Après plus de vingt ans de négociations, souvent laborieuses, le traité international visant à protéger la haute mer entrera en vigueur en janvier 2026. Ratifié par soixante pays, ce texte inédit constitue une avancée majeure pour la gouvernance des océans et la préservation de la biodiversité. La haute mer, qui couvre près de la moitié de la surface de la planète et 95 % de son volume, échappait jusqu’ici à tout cadre juridique global. Elle abrite pourtant des écosystèmes essentiels, menacés par la surpêche, la pollution plastique, l’exploitation minière sous-marine et le réchauffement climatique. Ce traité, adopté en 2023 à New York, fournit pour la première fois un outil permettant de créer des aires marines protégées en dehors des juridictions nationales et de réguler l’exploitation des ressources génétiques marines. L’annonce a été saluée par le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres : « C'est une réussite historique pour l’océan et pour le multilatéralisme. Alors que nous faisons face à une triple crise planétaire – changement climatique, perte de biodiversité et pollution –, cet accord est une bouée de sauvetage pour l’humanité... ». L’accord, également connu sous le nom de « Traité BBNJ » (Biodiversity Beyond National Jurisdiction), prévoit la création d’un organe de gouvernance chargé de superviser la mise en place de zones protégées, de partager équitablement les bénéfices tirés des ressources marines et de renforcer les capacités scientifiques des pays en développement.


Le Conseil d’État met fin à la chasse de l’alouette aux pantes. La FNC réplique...

Le Conseil d’État a ordonné, le 24 septembre 2025, la suspension de l’arrêté ministériel du 28 août 2025 autorisant la capture de 98 702 alouettes des champs au moyen de pantes (filets horizontaux) dans quatre départements du Sud-Ouest : la Gironde, les Landes, le Lot-et-Garonne et les Pyrénées-Atlantiques. Cette décision fait suite à une requête en référé déposée par la LPO et One Voice, qui dénonçaient une atteinte grave à une espèce en déclin dont les effectifs ont chuté d’environ 25 % en vingt ans. Le juge des référés a estimé qu’il existait un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté, notamment au regard de la directive européenne « Oiseaux », transposée dans le droit français. Le Conseil d’État rappelle que le statut prétendument traditionnel de la chasse ne justifie pas une dérogation automatique aux normes de protection. Selon la Fédération nationale des chasseurs (FNC), cette décision est « injuste et inacceptable ». Elle accuse le Conseil d’État de privilégier une « idéologie verte » au détriment du droit et du bon sens, et de ne pas avoir examiné les arguments techniques et scientifiques présentés par le ministère et les fédérations cynégétiques. La FNC défend que l’arrêté respectait la directive « Oiseaux » et affirme que les quotas fixés représentent une part minime (0,062 %) de la mortalité naturelle de l’espèce. Elle souligne aussi que cette pratique serait une tradition patrimoniale du Sud-Ouest qu’il faut préserver, et appelle les parlementaires à agir pour réviser l’interprétation de la directive européenne.


La psychologie du chasseur : quand l’instinct prédateur prend le pas sur la vigilance

Le sujet est d’importance, ce qui nous fait revenir sur cette déclaration du porte-parole des chasseurs de la Somme, qui, à l’orée de cette nouvelle saison cynégétique, déclarait : « la sécurité est suffisante ». À l’appui de son discours, des chiffres rassurants : l’an dernier, aucun incident n’a été recensé dans son département. Les vingt mille pratiquants sont soumis à des règles précises, participent à des échanges réguliers avec les riverains et dialoguent avec les associations de randonneurs ou de joggeurs. Sur le papier, la cohabitation semble équilibrée, presque exemplaire. Mais au-delà du règlement, demeure une zone grise rarement évoquée : la psychologie du chasseur au moment précis où il devient prédateur. Un tir de chasse n’est pas seulement un geste technique. C’est l’aboutissement d’un processus mental qui plonge le pratiquant dans une forme de tunnel perceptif. Lorsque l’animal surgit, le corps du chasseur se tend, ses sens se focalisent, son attention se resserre comme un faisceau lumineux. Cet état, que les psychologues rapprochent du « flow », décrit dans d’autres pratiques sportives, active une part archaïque de l’humain : l’instinct de prédation. La proie n’est plus un élément parmi d’autres du paysage, elle devient le centre unique de l’univers perceptif. Tout ce qui gravite autour, bruit de pas, mouvement dans les fourrés, un randonneur qui s’approche... peut être momentanément effacé de la conscience. Cette focalisation, en apparence banale et même nécessaire pour viser avec précision, comporte un revers. Elle induit une perte partielle de vigilance. Les chasseurs eux-mêmes le décrivent : à l’instant où l’animal surgit, « on ne voit plus que lui ». Ce phénomène psychologique, documenté en neurosciences, s’appelle l’exclusion attentionnelle. Le cerveau, saturé par la tâche prioritaire, relègue au second plan toutes les informations concurrentes. Ce mécanisme est un atout pour la survie lorsqu’il s’agit de traquer une proie dans un environnement hostile. Mais transposé dans nos campagnes modernes, où la nature est partagée par joggeurs, photographes, promeneurs et agriculteurs, il devient une source de risque...

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