Quand un solitaire passe le cap des quatre années de vie, on peut considérer qu’il a été chassé à plusieurs reprises et sa survie prouve qu’il a surmonté l’épreuve. Il a donc acquis une solide expérience et connait son point faible, surtout en période de rut : la forte odeur qui émane de son corps surchauffé. Il va donc tenter de la masquer en se rapprochant des compagnies dès les premiers signes d’agitation en forêt. Lors du lancer, la compagnie fuira entrainée par les laies, mais le mâle restera derrière, et ne se risquera à quitter les lieux que dix bonnes minutes plus tard, le temps nécessaire pour que le calme revienne. En revanche, s’il est attaqué en premier par les chiens, il tiendra le ferme, le temps d’évaluer le danger et la force de ses adversaires, avant soit de riposter et malmener les chiens, soit de fuir en tournant longtemps dans la coupe pour deux raisons : permettre à la compagnie de s’évaporer et détecter les emplacements des chasseurs postés.

 

Où trouver ces grands mâles ?

Si l'on excepte l'époque du rut, notamment décembre et janvier, les solitaires, qu’ils soient tiers-ans, quartaniers ou vieux sangliers, ont des préférences dont il importe de tenir compte. En automne, ils se cantonnent souvent en bordure de plaine, non loin des champs de maïs encore sur pied, mais aussi en forêt là où il y a des arbres fruitiers qui assurent, sans dépense énergétique inutile, la nourriture qu'ils préfèrent (châtaignes, glands, faines). En hiver, quand le froid s’installe et jusqu’à fin février, on les trouvera surtout dans les enceintes fourrées. Selon les conditions météo (vent et pluie) ils choisiront tel roncier plutôt que tel autre ou tel versant mieux exposé. S'ils sont trop souvent dérangés pendant la semaine, ils peuvent prendre un grand parti et vider la forêt en une nuit pour se remettre là où seul le diable pourrait les retrouver. Pour les autres sangliers, c'est l'hiver, après une longue période de mauvais jours, que l'on aura le plus de chances de les trouver dans un vallon bien abrité. Il est vrai que, par temps exécrable, les animaux ne s'écarteront pas, pendant plusieurs jours, de ce lieu plus confortable. Généralement, pour un œil averti, les traces, les vermillis et les boutis indiqueront leur présence.

 

Peu d’espoir avant la chute des feuilles

Pour être efficace dans les prélèvements, il faut attendre la chute complète des feuilles. Avant, la vue ne portera pas bien loin en sous-bois, donnant un avantage aux sangliers sur les chasseurs. Mais, dès que la vue portera plus loin, les bêtes noires deviendront visibles et repérables dans les enceintes qu’elles affectionnent : recepage de chênes, hêtres, sapins, riches en grands ronciers, argousiers, genévriers, genêts, buis sauvages. Ces zones constituent des remises excellentes, régulièrement occupées, donc à surveiller régulièrement. Autre indice à prendre en considération : les bêtes noires ne se remisent jamais sans effectuer plusieurs allées et venues devant la rentrée. De plus, qu'ils soient solitaires ou laies, suitées ou non, les animaux reviennent le soir, là où ils ont vermillé le matin. Autre indice : à leur retour du gagnage, les animaux aiment se vautrer dans les souilles, puis se frotter consciencieusement contre les arbres avoisinants. Ces « frottoirs » donneront une idée de la taille de celui qui a entaillé, de ses puissantes défenses, l'écorce des troncs d'arbres…