Par une décision du 10 novembre 2023, le Conseil d'État précise les règles permettant au juge administratif d'apprécier le phénomène de saturation visuelle dans le cas d'un parc éolien. Dans un arrêt précédent, en date du 1er mars 2023, la Haute Juridiction avait affirmé que le phénomène de saturation visuelle, qu'est susceptible de générer un projet d'installation classée, pouvait être pris en compte, par le préfet et par le juge, pour apprécier ses inconvénients pour la commodité du voisinage au sens de l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Avec cette nouvelle décision, le Conseil d'État vient préciser comment le juge de plein contentieux doit procéder dans le cadre de cette appréciation. Ce dernier, affirme-il, doit tenir compte « de l'effet d'encerclement résultant du projet en évaluant, au regard de l'ensemble des parcs installés ou autorisés et de la configuration particulière des lieux, notamment en termes de reliefs et d'écrans visuels, l'incidence du projet sur les angles d'occupation et de respiration ». Ce dernier est défini comme le « plus grand angle continu sans éolienne depuis les points de vue pertinents ». En l'espèce, le ministre de la Transition écologique s'était pourvu en cassation contre un arrêt de la cour administrative de Douai qui avait délivré à la société WP France 23, une autorisation unique portant sur quatre éoliennes projetées sur la commune de La Neuville-Sire-Bernard (Somme). Les juges d'appel avaient relevé que 72 éoliennes avaient déjà été autorisées dans un rayon de 10 km autour du village voisin du Plessier-Rozainvilliers, et seize dans un rayon de 3 km. Mais, pour écarter l'existence d'un effet de saturation visuelle susceptible de faire regarder le projet comme présentant des inconvénients excessifs pour la commodité du voisinage, ils s'étaient appuyés sur le fait que les éoliennes ne seraient pas toutes visibles simultanément depuis un même point, bien que le projet avait pour effet de porter le cumul des angles occupés par des machines à un total de 167,5 degrés. En statuant ainsi, les juges douaisiens ont commis une erreur de droit, juge le Conseil d'État. D'une part, la circonstance que les éoliennes ne soient pas toutes simultanément visibles depuis un même point n'est pas, « par elle-même, de nature à permettre d'écarter l'existence d'un effet de saturation ». D'autre part, la Cour n'avait pas tenu compte de « l'effet d'encerclement lié à la réduction de l'angle de respiration ». Le palais Royal annule par conséquent l'arrêt d'appel et renvoie l'affaire à la cour de Douai pour être rejugée.
alabillebaude
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