Aux Etats-Unis, l’évènement impensable qui s’est produit à Cleveland, en juin 1969, a incontestablement éveillé les consciences : la rivière Cuyahoga, gravement polluée par l’industrie, prenait feu. Les documents de l’époque, effrayants, montrent des flammes qui montaient à plusieurs dizaines de mètres de hauteur au-dessus du lit de cours d’eau. Ce fut l’une des pires catastrophes qui ont sensibilisé l’opinion publique américaine, conduisant à l’adoption de lois sur la protection de l’environnement. Mais cette rivière Cuyahoga n’était pas la seule touchée… En 2014, le lac Érié, après des décennies de pollution industrielle et agricole, était envahi par des algues toxiques, privant près d'un million de personnes, d’eau potable pendant plusieurs jours. C’est cet événement qui a poussé les habitants à se demander si les lois environnementales protégeaient réellement les écosystèmes. C’est dans ce contexte qu’Andrea Bowers présente son exposition « Existez, Prospérez et Évoluez Â» au Cleveland Museum of Contemporary Art. L’artiste, originaire de l’Ohio et reconnue à l’échelle internationale, s’est inspirée de la « Lake Erie Bill of Rights Â» (Déclaration des droits du lac Erié) en 2019, pour nommer son exposition. Cette loi vise Ã  établir une équivalence juridique entre les droits des cours d’eau et les intérêts de l’industrie. Le mouvement pour les droits de la nature n’est pas unique aux États-Unis. Des pays tels que l’Équateur, le Panama, la Bolivie et l’Espagne reconnaissent les droits des rivières, des lacs, des forêts et de la faune, dont les lois nationales respectives offrent une protection plus importante que les réglementations environnementales classiques, et permettent à des individus désignés d’appliquer ces droits en tant que gardiens légaux. « Existez, Prospérez et Évoluez Â» invite à réfléchir aux arguments philosophiques sous-tendant le mouvement pour les droits de la nature, qui n’est pas simplement une chose ou une propriété humaine, mais une communauté complexe à laquelle les êtres humains appartiennent. La science moderne confirme de plus en plus souvent cette idée, invitant les systèmes juridiques à s’adapter à cette réalité…