Par le stock de bois sur pied, l’Allemagne est l’État d’Europe le plus boisé, et, contrairement à la France, plus de la moitié des forêts sont propriété de l’État (principalement des Länder) ou d’une collectivité publique. Les conifères dominent, couvrant 57 % de la surface totale (20% en France). Sur la période 2018-2021, sous l’effet des canicules et de la sécheresse, les peuplements d’épicéas et de sapins ont subi des attaques de scolytes aux conséquences dévastatrices. Les objectifs importants de reboisement, ainsi que la stratégie de transformation pour rendre les forêts plus résilientes, avec les choix techniques privilégiés en Allemagne (régénération le plus possible naturelle, diversification des essences, gestion sans protection), sont confrontés à la pression des ongulés. L’ensemble des parties prenantes (États, forestiers, chasseurs, organisations environnementales, organismes scientifiques et universitaires) reconnaissent aujourd’hui cette pression comme un facteur déterminant pour l’avenir de la forêt. Les politiques ont dû envisager des réaménagements rapides et profonds, inscrits dans la stratégie forestière 2050 de l’État fédéral, et dans les stratégies des Länder, qui intègrent le sujet de l’équilibre avec les ongulés, dans des logiques de multifonctionnalité et de gestion durable où la résilience de la forêt passe avant le gibier.

 

Organisation

Si l’État fédéral joue un rôle d’encadrement législatif, chaque Land dispose de ses propres lois, et c’est à son niveau que sont organisées l’administration et la gestion de la forêt et de la chasse. Dans chaque Land, un ministère (voir deux dans le cas de la Bavière) a compétence pour l’administration des forêts et la gestion de la chasse. Les politiques en place s’appuient sur la responsabilisation, sur la connaissance ainsi que sur l’animation du dialogue entre le forestier et le chasseur. La mission a pu recueillir et étudier des informations et retours d'expériences concernant l'équilibre sylvo-cynégétique à deux niveaux :

- celui des politiques publiques et de leurs évolutions, parfois récentes,

- celui de terrains visités par la mission, ou présentés par ses interlocuteurs, terrains sur lesquels des actions résolues ont été engagées avec des résultats en termes de pratiques comme en termes d'évolution de la forêt.

Dans la conscience partagée que l’avenir de la forêt passe par la chasse et la réduction des populations de chevreuils (espèce la plus répandue en Allemagne), les associations de chasseurs et l’administration semblent avoir trouvé la voie d’un travail en intelligence dans le long terme, visant notamment à former les chasseurs pour une participation effective au défi posé, et à soutenir l’image positive de la chasse et son attractivité. Sur ce point, si les chasseurs sont moitié moins nombreux qu’en France, leur nombre augmente chaque année et la population se féminise, signes d’une activité récréative porteuse de sens collectif. Comme en France, le propriétaire forestier est titulaire du droit de chasse, ce qui entraîne sur le principe une prédominance des enjeux forestiers. L’équilibre forêt-ongulés est évalué essentiellement au regard de l’atteinte des objectifs sylvicoles, et le concept des indicateurs de changements écologique développés en France n’a pas fait école en Allemagne.