Imposer un cap clair
Ce drame n’est pas une fatalité. Il est le résultat d’une absence criante de règles. Aujourd’hui, les chasseurs entendent ce message : « Il y a trop de sangliers, il faut en tuer plus ! ». Mais aucun plafond n’est fixé : aucune ligne directrice nationale, et aucune densité de population jugée « acceptable ». Résultat : chacun interprète la situation à sa manière. Chacun fixe son propre seuil, ses propres urgences, ses propres limites. C’est comme si on disait à un automobiliste qu’il roule trop vite, sur une route sans limitation de vitesse. On accuse, on condamne, mais on n’a jamais défini les règles du jeu. Comment peut-on en arriver là, alors que l’État dispose pourtant de deux leviers parfaitement identifiés, pour gérer la grande faune sauvage :
- la chasse, encadrée dans le temps, avec des dates d’ouverture et de fermeture, des règles de sécurité, des contrôles ;
- et hors de ces périodes, les lieutenants de louveterie, agents spécialisés, assermentés, formés, indépendants.
Alors, pourquoi continuer à déléguer ces opérations de destruction à des chasseurs « bénévoles », souvent âgés, parfois mal formés, dans des conditions de sécurité précaires. Le président de la FDC d’Ille-et-Vilaine, André Douard, l’a dit : « ce drame aurait pu être évité ». Bien évidemment qu'il aurait pu être évité, mais encore faut-il avoir la volonté de poser les bases d’un encadrement digne de ce nom. Car aujourd’hui, on ne peut plus dire sérieusement qu’il s’agit d’un simple accident. Ce n’est pas un événement isolé : c’est le symptôme d’un système abandonné à lui-même sans balises claires, ni cadre uniforme. Tout le monde en pâtit : les victimes directes de ces tirs, les auteurs, les chasseurs eux-mêmes, qui deviennent les boucs émissaires d’un système sans boussole, les agriculteurs qui peinent à protéger leurs cultures, et même les citoyens, inquiets face à une gestion opaque et dangereuse de la faune. Et à force de laisser chacun faire « comme il peut », on finit par laisser faire... ce qu’il ne faut surtout pas faire !