Quel est donc ce journaliste au cou de taureau normand, qui vous offre les pages du Figaro, du Gaulois ou du Gil Blas où sont publiées ses nouvelles ? Vous l’avez reconnu, bien sûr ! C’est Guy de Maupassant, notre conteur, amateur de la campagne vraie et des sports en plein air : yachting, canotage et surtout la chasse devant soi avec son épagneul Paff. Un vrai chasseur, qui ne laisserait à personne le soin de confectionner ses cartouches, dosées en fonction de ses tirs. Son cœur ne balance pas entre un rendez-vous avec une de ses maîtresses, la belle comtesse Potocka et l’ouverture : ce sera le respect absolu du rituel cynégétique, ce même rituel qui pousse la migration des guillemots vers les mêmes « enragés tireurs ». Né en 1850, Guy de Maupassant quitta prématurément ce monde en 1893. Son œuvre couvre donc la fin du Second Empire, la défaite et la défense des frontières pour laquelle il s’engagea, et la reconstruction de la France. Quelle matrice de violence et de cruauté, de vanités mesquines et d’honneur bafoué, pour alimenter ses écrits. A quel titre peut-on classer Maupassant dans les écrivains cynégétiques ? Avec l’école littéraire naturaliste, Maupassant cherchait à découvrir, sous la banalité du quotidien, un aspect inédit et nouveau. Plus que la trame très mince de ses contes, leur intérêt réside dans la peinture vraie du monde rustique qu’il décrivait. Dans les « Contes de la Bécasse », en 1883, il cisèle des récits secs, veinés, d’une verve âpre et caustique, que l’éditeur a le bon goût de publier entre l’ouverture de la chasse et la fin de l’année, de quoi faire oublier le manifeste de l’auteur contre l’érection de la Tour Eiffel.
Par Louis-Gaspard Siclon