Que se passe-t-il dans l’Hérault ?
Pour ce regain de vie constaté chez les lapins, les plus optimistes pensent que, un jour prochain, on retrouvera des animaux auto-immunisés contre ce fléau répandu il y a 71 ans en France : la myxomatose. Plus prosaïquement, il est sans doute plus prudent de penser que ce sont les conditions climatiques exceptionnelles de ces derniers mois qui ont favorisé cet essor. Les lapins bénéficient, à cette époque particulièrement sèche de l’année, de conditions de survie optimum. L’absence ou le peu d’insectes, porteurs et transmetteurs du myxome infectieux, explique en partie cette situation. Mais plane toujours la menace de la maladie. Rappelons qu’elle sévit encore partout en France, selon les cycles d’éclosion des vagues d’insectes. Ce virus de la myxomatose a été observé pour la première fois en 1898 à Montevideo, par le microbiologiste Sanarelli. Quarante ans plus tard, le biologiste Aragao établissait que la maladie sévissait à l’état endémique parmi les lapins sauvages du Brésil, considérés comme ayant été le réservoir originel du virus. Mais c’est Schillinger qui démontra que les moustiques étaient susceptibles de jouer un rôle considérable, en tant que transmetteurs du virus, étant porteurs infectés et infectants. D’autres insectes (puces, poux, simulies…) sont également à même de propager le virus, mais leur rôle est de moindre importance. En 1950, en Australie où des lapins européens (Oryctolagus cuniculus) furent introduits au 18e siècle, ils avaient tellement proliféré que le gouvernement ordonna une vaste campagne d’éradication… en introduisant le virus myxoma dans le pays. Le succès fut au rendez-vous, aussi foudroyant que l’hécatombe, puisque les estimations font état de plus de deux cents millions de lapins éliminés en quelques semaines. Cela donna l’idée, deux ans plus tard, en France, au professeur P. Armand-Delisle, propriétaire en Eure-et-Loir, de faire la même chose. Sur sa demande, et ce n’était pas interdit à l’époque, il reçut le virus infectieux le 19 janvier 1952, en provenance du « Centre de collections de types microbiens » de Lausanne, que dirigeait le professeur Paul Hauduroy, qui précisait ceci : « Je vous signale aussi, mais vous le savez probablement, que les lapins infectés sont éminemment contagieux, que la cage dans laquelle ils se trouvent doit être détruite après usage, et que les personnes qui s’occupent de ces lapins risquent d’infecter d’autres animaux… ». Le 23 janvier 1952, le docteur Armand-Delille répondait : « … Merci pour les indications très précises que vous me donnez sur son emploi, et auxquelles je me conformerai à la lettre… » (courriers publiés dans le « Journal de Genève » du 25 octobre 1953). On sait ce qu’il advint : le virus s’est rapidement propagé dans toute l'Europe continentale et au Royaume uni, affichant le taux de mortalité très élevé de 95% chez les lapins. Cette affection foudroyante se manifeste par divers symptômes : le lapin malade présente des « myxomes », qui sont des petits nodules rouges et durs qui se développent principalement sur les paupières, le chanfrein et le nez. L’animal devient alors fiévreux, anorexique et apathique. Il s’affaiblit progressivement et la plupart des sujets atteints meurent dans les 15 jours qui suivent l’apparition des symptômes. Soixante et onze ans après l’infestation, on ne connait aucune méthode de vaccination susceptible d’application courante, et aucun remède n’a permis de traiter la maladie. Mais l’espoir est toujours là…